Quand Yannick a proposé une semaine de raquettes nu ou de randonnue dans le val d’Aran, je n’ai pas hésité, ne connaissant que de nom ou de lectures ce coin des Pyrénées espagnoles. Une occasion idéale de découverte. On est basé dans le village d’Arties. Un gîte juste assez grand pour un groupe de dix personnes, avec une disposition compliquée sur quatre niveaux, mais dont le salon équipée d’une grande cheminée nous accueillera tous les soirs pour les apéros devant un grand feu de bois. Arties est situé à quelques kilomètres seulement de la grande station de ski de Baqueira -Beret, station royale. Entre hôtels de luxe, résidences de tourisme et ensembles de résidences secondaires, la physionomie de ce bout de vallée est d’une homogénéité impressionnante : bâtiments de pierres grises, toits noirs, balcons de bois sombre. Les normes architecturales sont strictes et respectées. Seules trois maisons peintes de couleurs vives surprennent au milieu du village.
Dimanche. La route pour les Bains de Trélod est coupée à 3,5km en avant. Il faut se résigner à monter à pied. Mais un petit sentier zigzagant dans la forêt nous évite la portion de route. On a laissé les raquettes dans les voitures. Ici il n’y a pas la moindre trace de neige. Le ciel est bleu. On a vite chaud et on se retrouve nus. On se fait doubler par quelques randonneurs plus rapides, puis tout un groupe. Mais on est en Espagne, l’acceptation de la nudité est tout autre qu’en France. On reçoit des saluts « ola », des sourires. Quelle tranquillité d’esprit de pouvoir ainsi randonner nus sans crainte. On arrive aux Bains de Trelod en même temps qu’un groupe textile. Ils s’arrêtent au bâtiment, on continue par un sentier qui longe le ruisseau. A partir de là on marche dans une neige peu épaisse. On passe devant une belle cascade puis on rejoint une piste. Là, une douzaine de motoneiges sont garées. Il n’y a plus assez de neige pour cette activité touristique mécanique. Quelques kilomètres de piste un peu monotone. On arrive au pied de la dernière montée par un cheminement bien enneigé. Il arrive parfois que l’on enfonce dans les trous de neige jusqu’aux genoux. Mais l’effort en vaut la peine lorsque l’on débouche derrière le barrage au lac de Colomèrs, encore recouvert de glace, resplendissant dans son écrin de montagnes! On resterait bien volontiers là au soleil durant des heures, mais le temps passe, il faut entamer la descente. En longeant le ruisseau Patrick et Bruno ne résistent pas à la tentation d’un rapide bain d’eau glacée ! Le retour ensuite par la route est long et on arrive presque à la tombée de la nuit avec 20 kilomètres dans les pattes pour cette « mise en jambe ».
Lundi, on part avec les raquettes du parking de la station de Beret, au milieu de la foule des skieurs. Il fait gris et froid et la journée se passera habillée. On s’éloigne du domaine skiable par des vallons sauvages jusqu’à atteindre le premier lac de Baciver. Paysage en noir et blanc avec une touche d’un bleu pâle d’une eau qui commence à fondre. Une partie du groupe entreprend le retour. A six on continue de monter vers les lacs supérieurs. Selon les rythmes de chacun on se retrouve vite séparés deux par deux. En arrivant au dessus du lac, invisible sous la neige, on constate que les nuages descendent. On se regroupe pour ne pas risquer de se faire surprendre par la brume. Au cours du casse croûte à l’abri sous les sapins, quelques flocons de neige.
Mardi, pluie.
Mercredi, on repart d’un deuxième parking de Beret. De là une piste bien balisée et manifestement très fréquentée mène au sanctuaire et au refuge de Montgarri, haut lieu chargé d’histoire. Retour par une deuxième piste sur l’autre versant du vallon. Il fait chaud à l’abri de la forêt, je me déshabille tout en gardant mon blouson entre-ouvert. Mais en arrivant sur le plateau de Beret le vent glacial m’incite vite à me rhabiller.
Jeudi. On arrive sur le parking d’un télésiège au-delà du Port (col) de la Bonaiga. Mais l’ambiance du lieu ne nous plaît guère. Ciel couvert, pentes raides encore enneigées, froid. Demi tour. On se dirige vers Es Bordes, au-delà de Vielha. Par une petite route on rejoint le parking sous la chapelle dera Mair de Diu dera Artiga de Lin. Quelques centaines de mètres sur la route, puis chemin en sous bois. Nus. On arrive au bord du torrent qui jaillit. On monte jusqu’à un parking plein de voitures. Juste en dessous le sentier est aménagé avec belvédère en face de la cascade, le but des promeneurs en familles. Si notre nudité surprend, pas une trace de protestation. On plaisante avec un groupe qui veut faire traverser la passerelle à un chien. Sur le chemin qui continue ce sont aussi des « ola » et des sourires. Jean Paul qui s’est cogné le genou fait demi tour avec Dominique. On arrive dans un cirque de sommets, hauts, enneigés et resplendissants. C’est le massif de la Maladeta qui entoure le pic de l’Aneto, point culminant des Pyrénées à 3404m. Pique nique, mais on se rhabille car à presque 1500 m d’altitude et ainsi entourés de pointes à 3000 m, l’ambiance est plutôt fraîche. Un petit tour au refuge et à la cascade de Pomèro et on reprend le chemin en sens inverse.
Vendredi. Temps gris et humide. Petite balade autour d’Arties.
J’avais déjà remarqué en 2019 lors de la course de Sopela au pays basque ou lors d’un passage près de Roses sur la côte méditerranéenne cette tolérance envers la nudité, preuve d’un respect pour la liberté d’autrui, d’une civilité que l’on rêverait de retrouver ici en France.
When Yannick suggested a week of snowshoeing or hiking in the Val d’Aran, I didn’t hesitate, knowing this corner of the Spanish Pyrenees only by name or from what I’d read. An ideal opportunity for discovery. We’re based in the village of Arties. A gîte just big enough for a group of ten, with a complicated layout on four levels, but whose living room with its large fireplace welcomes us every evening for aperitifs in front of a roaring log fire. Arties is just a few kilometers from the royal ski resort of Baqueira-Beret. With its mix of luxury hotels, tourist residences and second homes, the appearance of this part of the valley is impressively homogeneous: gray stone buildings, black roofs, dark wood balconies. Architectural standards are strict and respected. Only three brightly painted houses stand out in the middle of the village.
On Sunday, the road to the Trélod baths is cut off 3.5km ahead. We had to resign ourselves to walking up. But a small path zigzagging through the forest saves us that stretch of road. We left our snowshoes in the cars. There’s not a trace of snow here. The sky is blue. We quickly become hot and naked. We’re overtaken by a few faster hikers, then a whole group. But this is Spain, and the acceptance of nudity is quite different from France. We’re greeted with « ola » salutes, « ola » smiles and « ola!
What peace of mind to be able to hike naked without fear. We arrive at the Trelod baths at the same time as a textile group. They stop at the building, and we continue along a path that runs alongside the stream. From here, we walk in shallow snow. We pass a beautiful waterfall and join a track. Here, a dozen skidoos are parked. There’s not enough snow left for this mechanical tourist activity. A few kilometers of somewhat monotonous trail. We reach the foot of the last climb via a snow-covered path. Occasionally, we sink knee-deep into the snow holes. But the effort is well worth it when we arrive behind the dam at Lac de Colomèrs, still covered in ice, resplendent in its mountain setting! We’d love to stay there in the sun for hours, but time runs out and we have to start our descent. Following the stream, Patrick and Bruno can’t resist the temptation of a quick dip in the icy water! The return journey by road is a long one, and we arrive almost at nightfall with 20 kilometers in the bag for this « warm-up ».
On Monday, we set off with our snowshoes from the Beret resort parking lot, in the middle of the crowd of skiers.
It’s a cold, gray day, and we’ll be spending it with our clothes on. We head away from the ski area through wild valleys until we reach the first Baciver lake. A black-and-white landscape with a touch of pale blue as the water begins to melt. Part of the group heads back. Six of us continue to climb towards the upper lakes. Depending on our individual rhythms, we soon find ourselves separated into pairs. Arriving above the lake, invisible under the snow, we notice that the clouds are descending. We regroup to avoid being caught in the mist. During a snack in the shelter of the fir trees, a few snowflakes fall.
Tuesday, rain.
Wednesday, we set off again from a second Beret parking lot. From here, a well-marked and obviously well-frequented trail leads to the sanctuary and refuge of Montgarri, a place charged with history. Return via a second track on the other side of the valley. It’s a warm day in the shelter of the forest, and I undress with my jacket partly open. But as I reach the Beret plateau, the icy wind quickly prompts me to put my clothes back on.
Thursday. We arrive at a chairlift parking lot beyond the Port (col) de la Bonaiga. But we don’t like the atmosphere here. Overcast, steep slopes still covered in snow, cold. Half turn. We head for Es Bordes, beyond Vielha. A narrow road brings us to the parking lot below the chapel of dera Mair de Diu dera Artiga de Lin. A few hundred meters on the road, then a path in the undergrowth. Naked. We come to the edge of the gushing torrent. We climb up to a parking lot full of cars. Just below, the path is laid out with a belvedere facing the waterfall, the goal of family walkers. If our nudity comes as a surprise, there’s not a trace of protest. We joke with a group who want to take a dog across the footbridge. On the path that continues, there are also « ola’s » and smiles. Jean Paul bumps his knee and turns back with Dominique. We arrive in a circus of peaks, high, snow-capped and resplendent. This is the Maladeta massif, which surrounds the Aneto peak, the highest point in the Pyrenees at 3404m. We have a picnic, but we have to get dressed, because at an altitude of almost 1,500 m and surrounded by peaks at 3,000 m, the atmosphere is rather chilly. A quick trip to the refuge and the Pomèro waterfall, and we’re back on the road in the opposite direction.
Friday. Grey, damp weather. Short walk around Arties.
I had already noticed in 2019 during the Sopela race in the Biscay country or during a passage near Roses on the Mediterranean coast this tolerance towards nudity, proof of a respect for the freedom of others, of a civility that one would dream of finding here in France.